La Quinzaine du Commerce Equitable destinée à durer jusqu'au dimanche 23 mai a été lancée samedi 8, à Lille, par l'inauguration de la 5e édition du Forum National du Commerce Equitable.

C'est la première fois que ce salon se tenait en province. Durant trois jours plus de 5000 visiteurs sont venus à la rencontre des 70 exposants représentant les nombreuses structures nationales ou régionales, coopératives, associations, ou entreprises qui animent le monde du commerce équitable.

Marc-Philippe Daubresse, Ministre de la Jeunesse et des Solidarités actives, et par ailleurs, maire de Lambersart, une ville de la banlieue lilloise participa à cette manifestation de lancement en compagnie de Christiane Bouchart, élue à la mairie de Lille, en charge du développement de l'économie sociale et solidaire et, par ailleurs, présidente du Réseau des Territoires pour une Economie Solidaire (RTES).

Lors de l'ouverture du Forum, faisant allusion aux 50 propositions contenues dans le rapport Vercamer sur l'économie sociale et solidaire, récemment remis au président de la République, Marc-Philippe Daubresse a déclaré : « nous avons décidé de faire durant l'année qui vient tout ce qui peut être fait pour accélérer le développement de l'économie sociale et solidaire, dans laquelle le commerce équitable joue un rôle important. »

« Nous traversons une crise sans précédent, ajouta le ministre, dans laquelle des amortisseurs sociaux ont joué un rôle considérable, notamment l'économie sociale et solidaire, qui a mieux résisté et continué à créer des emplois non délocalisables. Face à cette crise, estima encore le ministre, la question du sens de la société devient majeur dans la réflexion et pour les prises de décisions. »

Des régions, « laboratoire de l'économie sociale »

Pour lui, sur les 50 propositions du rapport Vercamer, « 15 sont immédiatement réalisables, 15 le sont à moyen terme, les autres demandent des modifications juridiques et demanderont donc plus de temps. »

Le ministre, maire de Lambersart, en voisin, fit des propositions à la fois à Martine Aubry, la maire de Lille, à Pierre de Saintignon, chargé du développement de la région au Conseil régional du Nord – Pas-de-Calais et à Bernard Derosier, le président du Conseil général du Nord.

« Ce que nous avons fait, hier, pour la rénovation urbaine, nous devons pouvoir le faire dans le domaine de l'économie sociale et solidaire. Dans cette région, où beaucoup de choses ont été inventées dans le domaine de l'économie sociale et solidaire : les mutuelles, les coopératives, l'insertion,…et dans quelques autres, essayons de faire un laboratoire social. Nous pourrions essayer, déclara Marc-Philippe Daubresse, de mettre en œuvre sur des territoires les ingrédients de ce qui pourrait être un autre modèle plus respectueux des hommes et de la nature. Dans ce labo social, nous pourrions financer des expériences dans le champ de l'économie sociale et solidaire. »

Sans doute, les nombreux acteurs de terrain qui déjà transforment la réalité locale, et dont certains sont particulièrement inquiets, pour leur avenir, compte tenu des tensions financières enregistrées en provenance de l'Etat, regarderont avec attention le contenu et la réalité des propositions tant nationales que locales. L'expérience et l'innovation est déjà le quotidien des acteurs de l'économie sociale et solidaire. Et elle a un prix.

Promouvoir un autre modèle

Christiane Bouchart, présidente du RTES, Conseillère communautaire de Lille s'est réjouie « que le 5e Forum du Commerce Equitable soit labellisé au titre de l'année européenne de lutte contre la pauvreté et l'exclusion. » Une reconnaissance qui vaut également pour la campagne intitulée « équitable au quotidien » mise en place par la ville de Lille depuis le mois de janvier. L'élue Verte y voit un signe de reconnaissance de la qualité des actions entreprises par l'instance européenne.

L'organisation à Lille de cette manifestation en collaboration avec la plateforme nationale pour le commerce équitable, Max Havelaar France et le groupe SOS marque, selon Christiane Bouchart, « un temps fort dans la continuité des engagements de la ville de Lille, en faveur de l'économie sociale et solidaire. »

« Les valeurs du commerce équitable, sont celles de l'économie sociale et solidaire, considère la présidente du RTES. : assurer une juste rémunération des producteurs prenant en compte les coûts économiques, sociaux et environnementaux. »

Pour l'élue lilloise, le Forum du Commerce Equitable et la Quinzaine « doivent consolider et dynamiser le développement du commerce équitable et montrer qu'un autre commerce est possible. Ils doivent aussi permettre à ce secteur économique en plein essor de continuer à s'ancrer sur les territoires afin d'aider au développement des commerces de produits équitables. »

Pour la présidente du RTES, « les enjeux du commerce équitable s'inscrivent dans des finalités plus larges, à savoir : consommer autrement, promouvoir un autre modèle de développement. »

« Le désir de consommer autrement, souligna Christiane Bouchart, dans son intervention, pose la question du modèle économique qui définit la nature et les modalités de nos échanges. En défendant, les valeurs du commerce équitable, nous replaçons l'économie à sa juste place et nous le situons en contrepoint du modèle dominant du « toujours plus à moindre prix », source d'injustice sociale et de graves dégradations environnementales, générant des phénomènes de concentration et de monopole, des délocalisations, des pressions incessantes sur les fournisseurs et producteurs, qui laissent bien peu de place aux richesses humaines. »

Pour une économie équitable

Majdouline Sbai, vice-présidente du Conseil régional du Nord – Pas-de-Calais, autre acteur important du développement de l'économie sociale et solidaire dans cette région, a tenu, lors de cette inauguration, un discours choc. « Si les acteurs du commerce équitable, ont dû inventer cette notion de commerce juste, éthique, solidaire, équitable, déclara-t-elle, c'est parce qu'il y a un commerce qui n'est pas équitable, qui est injuste, destructeur et néfaste pour l'homme et l'environnement. »

« Le commerce équitable, expliqua-t-elle encore, c'est une invitation à inventer ensemble un autre modèle de société. Il dit qu'un autre monde est possible, qu'il est indispensable, qu'il est à notre portée, et je dirais qu'il est déjà là. Le capitalisme, après un règne de 200 ans, s'est métamorphosé en entrant dans une phase mortifère. Il génère tout à la fois une crise économique majeure et une crise écologique d'ampleur historique. » « Pour sauver la planète, affirma l'élue verte, il faut sortir du capitalisme, en construisant une société où l'économie n'est pas reine, mais outil, où la coopération l'emporte sur la compétition, ou le bien commun prévaut sur le profit. »

« Aujourd'hui, proclama la vice-présidente du Conseil régional, c'est l'économie qu'il faut mettre en débat. Avec les citoyens, c'est toute l'économie qui doit devenir équitable. »

Durant cette quinzaine du commerce équitable, lancée à Lille, de nombreuses manifestations ont lieu à travers toute la France, témoignant d'une sensibilisation de plus en plus forte à ce commerce affichant la volonté d'un plus grand respect des producteurs du sud, et contribuant à une amélioration de leurs conditions de vie.

(à suivre…)

Jean-Paul BIOLLUZ