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Paris RSA : la solidarité active, c'est t'enfoncer la tête sous l'eau quand tu perds pied.

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La propagande a fait son œuvre : à l'heure où le RSA entre en vigueur, on a réussi à nous faire oublier que le RMI était un minimum, un misérable moins que rien, un substitut au nécessaire qu'un des pays les plus riches du monde ne veut pas garantir à chacun.

Longtemps, les 400 euros mensuels sont aussi restés la dernière bouée de sauvetage, de, ceux , qui un jour perdent pied et n'ouvrent plus leur courrier. Le truc qui permettait tout simplement de ne pas crever de faim, de ne pas se retrouver en un mois sur le trottoir quand on n'a plus temporairement la force d'affronter le jeu de massacre quotidien qu'est la vie de précaire , notamment à Paris.

Tout le monde a ses passages à vide, tout le monde , un jour ou l'autre jette l'éponge, ne va plus à ses rendez-vous, n'ouvre plus son courrier, ne décroche plus le téléphone, ne remplit plus la paperasse.

Quand on est président du Conseil général comme Bertrand Delanöe , on n'y échappe pas forcément surtout quand on vient de perdre les JO, ou de se manger une bonne veste de la part de ses camarades de parti alors qu'on se voyait déjà…

Mais, les moments de blues ne portent pas à conséquence, on a une armée de directeurs de cabinet pour bosser les dossiers, répondre au téléphone, rassurer la presse. On a ses adjoints pour aller inaugurer ceci ou cela, les jours où on ne peut décidément se résoudre à affronter la foule et se forcer à boire du champagne, encore et encore.

Quand on est précaire et pauvre, pas de directeur de cabinet, pas d'indulgence respectueuse et compatissante de la part des collaborateurs à l'écoute, nous, nous n'avons que des contrôleurs à l'affût.

Le précaire que nous accompagnons ce matin en fait depuis des mois l'amère expérience. Ce qui lui est arrivé est bien plus grave et concret qu'une défaite politique et ses blessures à l'âme, il a eu un accident, plusieurs opérations, des complication successives, si bien que les médecins ont longtemps cru que sa mobilité serait entravée à vie.

Alors, forcément, quand on doit affronter tout ça, trouver quelqu'un qui puisse nous héberger les mois où l'on n'a aucune autonomie physique, supporter la douleur, les séjours à l'hosto, la peur de rester invalide, les convocations à la Cellule d'Appui pour l'Insertion, on les loupe.

Et on ne prend pas l'initiative de rappeler, de se confondre en excuses parce notre vie part en sucette.

Et ce d'autant plus quand on sait d'expérience que ces rendez-vous ne sont que des convocations, qu'en trois ans de suivi, la seule offre d'emploi qu'on nous a soumise était périmée.

Et puis on se remet tout seul comme un grand, sans le Conseil Général, avec uniquement la solidarité de ses proches.

Et au moment où on sort la tête de l'eau, où la santé va mieux, on se retrouve suspendu du RMI, sans aucune ressources.

Et en quelques semaines, tout s'enchaîne : on perd son droit aux réductions tarifaires transport, celui à la CMU qui n'est plus renouvelé à cause de la suspension, l'allocation logement qui va avec le RMi, elle aussi. On écrit alors son recours, on explique en long et en large, on joint une pléthore de certificats médicaux, on recontacte son référent RMI qui n'a plus le droit de nous recevoir. On ne se laisse pas abattre, on trouve même quelques jours de boulot.

Et puis, après plusieurs mois sans rien, alors que les mois de loyers de retard se sont accumulés, qu'on a arrêté les soins faute de couverture santé, qu'on est endetté jusqu'au cou, on reçoit la réponse de Bertrand Delanöe, enfin plutôt celle du collaborateur qui a la délégation de signatures.

« Vous évoquez vos problèmes de santé. Ceux-ci ne peuvent être pris en compte ».

Une phrase qui précède la décision de radiation définitive.

La solidarité active, la leur, se résume en deux mots : va crever.

Nous n'irons pas, en tout cas pas sans bruit, et tête basse.

Ce matin, nous sommes donc venus en nombre à l'Espace Insertion du 10ème, tous allocataires, tous abonnés aux rendez-vous manqués pour cause de j'en peux plus et de je veux qu'on me foute la paix. Tous déserteurs par intermittences de la petite guerre de l'insertion contrainte, tous sujets aux nausées récurrentes devant la petite phrase rituelle des rendez-vous matinaux avec le référent RMI « Alors, comment on a avancé depuis la dernière fois qu'on s'est vus ? »

Nous assumons nos reculs, devant ceux qui ne savent même pas ce qu'est nager à vie à contre courant.

Rituel ordinaire de la réception parisienne des collectifs de précaires : on n'a pas pris rendez-vous, nos méthodes sont inacceptables, personne ne sera reçu, d'ailleurs c'est bien simple, on ne veut même pas commencer à discuter de ce pour quoi nous sommes là, on nous demande solennellement de sortir, sinon , sinon, sinon…

Sinon quoi ? Préoccupation récurrente en ces temps d'aggravation de la misère et de répression sociale , de quoi menace-t-on ceux qu'on a déjà privés de tout ?

De la perte de leurs allocations, quand ils sont déjà radiés ? De se faire virer collectivement de l'Espace Insertion, ou ils se sont fait virer individuellement les jours précédents ? De problèmes avec la police, quand de toute façon, la probabilité d'en avoir devient quotidienne parce qu'il faut bien au moins, se remplir le ventre ?

Donc, après appel au bureau du RMI, la directrice de l'Espace Insertion se résoud à nous recevoir. Et à voir surtout ceux qui lui font face, au lieu d'agir sans même avoir pris le temps de les regarder, avec les préjugés qu'on lui a inculqués, sur les précaires en lutte qui mangent tout cru les travailleurs sociaux.

Nous ne sommes pas venus la harceler, nous sommes venus soutenir un précaire comme nous, face à ses supérieurs.

Et seule la solidarité collective permet d'obtenir le minimum, l'instruction dans les prochains jours d'une nouvelle demande de RMI , et l'assurance que celui-ci sera versé sans la conclusion préalable d'un nouveau contrat d'insertion, à cause de la radiation. Qu'un vrai travail social va être mis en route, pour qu'il recouvre ses autres droits, puisse obtenir une aide au paiement de son loyer.

En attendant la réponse du président du Conseil Général sur l'annulation de la radiation, puisqu'on nous indique que le dossier sera réexaminé rapidement.

Ca urge en effet, et pas seulement pour notre camarade précaire qui ne pourra rembourser ses dettes de loyer que si la radiation est annulée.

Les précaires en lutte, contrairement aux médias, on perdu la sale habitude de juger une politique sociale aux déclarations publiques des élus.

Nous savons bien que ce n'est pas au prochain Conseil de Paris, que se décidera ce que va être la réalité concrète du RSA dans la capitale.

Mais que cette réalité se met en place, discrètement au quotidien dans la pratique du contrôle et des sanctions.

Si désormais, l'on radie les malades pour de simples absences aux convocations, si le droit à rien devient la norme administrative, si nous n'avons décidément plus rien à perdre avec le RSA, alors nous avons tout à gagner à lutter beaucoup, et à déranger énormément.


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